À qui tombe la responsabilité d’aider le Campus Saint-Jean ?
Bienvenue à la nouvelle plateforme du Mouton Noir! Afin de promouvoir l’inclusivité francophone dans la communauté de l’Université de l’Alberta, Le Mouton Noir et The Gateway collaborent dans cette nouvelle rubrique destiné à servir ceux.lles d’expression française.
La semaine passée, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes a accueilli la ministre des langues officielles, Mélanie Joly, dans le cadre de son étude sur le soutien fédéral pour les institutions postsecondaires en situation minoritaire. En avril 2021, le gouvernement fédéral a annoncé que $121,3 millions seraient réservés à ces institutions particulières.
Cependant, le gouvernement fédéral a mis une condition sur l’allocation de cet argent : ces institutions ont besoin du soutien financier de leur gouvernement provincial afin d’être en mesure d’accéder au financement fédéral.
Plusieurs membres du Comité ont relevé des questions au sujet de cette problématique, par exemple, celle posée par le député Alexandre Boulerice:
« Est-ce que pour le cas du Campus Saint-Jean, est-ce que vous me dites que vous allez attendre que le gouvernement provincial agisse avant de faire votre part, puis défendre, puis sauver le Campus Saint-Jean ? »
La ministre Joly a répondu à ces questions en évoquant que l’éducation est de juridiction provinciale. De plus, selon elle, le gouvernement fédéral a déjà fait sa part en allouant l’argent aux institutions. Sa réponse suggère que c’est maintenant la responsabilité des gouvernements provinciaux de soumettre une proposition pour cet argent et d’allouer une contribution financière égale à celle du gouvernement fédéral.
Comment est-ce que cela impacte le Campus Saint-Jean? En tant qu’étudiantes du Campus Saint-Jean, la réponse de la ministre Joly nous inquiète. Il faut comprendre la situation complexe du Campus Saint-Jean en tant que seule institution postsecondaire francophone dans l’Ouest canadien. En fait, l’institution postsecondaire francophone la plus proche de nous est l’Université de Saint-Boniface au Manitoba.
Pendant le mois de mai 2020, le Campus Saint-Jean a dû annuler presqu’un quart de ses cours en raison de son sous-financement. Par conséquent, plusieurs étudiant.e.s ne sont pas capables de terminer leur programme entièrement en français. Encore aujourd’hui, le Campus n’a pas reçu de fonds pour assurer la continuité de ses programmes, et les étudiant.e.s continuent de ne pas être capable de terminer leurs études en français.
Les étudiant.e.s internationaux.ales et les francophones venant de plusieurs provinces et territoires canadiens dépendent du Campus Saint-Jean pour l’instruction postsecondaire en français. Par conséquent, ces enjeux financiers affectent gravement les étudiant.e.s francophones et d’expression française. En comparaison, les étudiant.e.s anglophones en Alberta ont plusieurs choix en termes d’institutions postsecondaires alors que les étudiant.e.s francophones, n’ont que le Campus Saint-Jean.
En ce qui concerne la réponse de la ministre, nous comprenons bien que le gouvernement fédéral veut encourager les provinces à agir et à respecter les langues officielles. Cependant, cette condition nous inquiète car l’appui pour la langue française ne semble pas être une priorité en Alberta puisque le gouvernement albertain se défend actuellement contre une poursuite judiciaire pour financer le Campus Saint-Jean.Il faut reconnaître que le fait de mettre une condition de fonds égaux venant de la province risque d’empêcher le Campus Saint-Jean d’accéder à sa part des 121,3 millions de dollars.
La ministre a aussi évoqué le fait que l’éducation est de juridiction provinciale. Nous ne disputons pas ce fait. Par contre, nous croyons que notre situation va au-delà d’une question d’éducation. Nous croyons que notre situation est entièrement de juridiction fédérale ; bien que l’éducation soit un enjeu provincial, le respect et la préservation des deux langues officielles relèvent du fédéral.
Au nom de la protection de la langue française dans l’Ouest canadien, nous croyons que le gouvernement fédéral ne doit pas attendre une proposition du gouvernement provincial avant d’agir. Étant donné que le Campus Saint-Jean joue un rôle incroyablement important dans la protection et l’avancement de la langue française, c’est le devoir du gouvernement fédéral d’assurer que le Campus Saint-Jean puisse continuer d’offrir des programmes en français à ses étudiant.e.s actuel.le.s et aux étudiant.e.s futur.e.s. Ceci est d’autant plus important lorsque la province refuse de fournir de l’aide. Bref, nous voulons sincèrement que les gouvernements fédéral et provincial arrêtent de jouer un jeu, à savoir à qui incombe la responsabilité d’aider le Campus Saint-Jean.
En fin de journée, le Campus Saint-Jean a besoin d’aide financière, maintenant. Étant donné son statut comme institution postsecondaire en milieu minoritaire, notre Campus mérite l’attention immédiate du gouvernement fédéral et ce, sans réserve. Nous nous adressons au gouvernement fédéral et nous l’invitons à passer à l’action et à intervenir. Au lieu de mettre la pression politique sur le gouvernement albertain, soulagez la pression financière qui existe déjà au Campus Saint-Jean – et qui a existé, en grande force, depuis plus d’un an. Soutenez les étudiant.e.s francophones et d’expression française en milieu minoritaire. Protégez et faites avancer la francophonie canadienne, comme il est attendu du gouvernement d’un pays bilingue depuis sa conception.
Cet article est écrit par Chiara Concini et Joannie Fogue, des représentantes élues de l’Association des Universitaires de la Faculté Saint-Jean (AUFSJ).